Emmanuel Macron commémore dimanche le 80e anniversaire de la Rafle du Vel d’Hiv en inaugurant, en compagnie de rescapés, un nouveau lieu de mémoire dans l’ancienne gare de Pithiviers (Loiret), d’où sont partis huit convois pour Auschwitz-Birkenau.
A cette occasion, le chef de l’Etat prononcera un « discours offensif » contre l’antisémitisme, qui « rôde encore et parfois de manière insidieuse », ce qui est « très préoccupant », a annoncé un conseiller de l’Elysée.
Il dénoncera également le « révisionnisme historique », notamment sur le rôle du maréchal Pétain pendant la Seconde Guerre mondiale, selon lui.
Accompagné de plusieurs personnalités, dont l’historien Serge Klarsfeld, la rescapée des camps Ginette Kolinka, ou encore le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou, Emmanuel Macron est attendu à 15H00 dans la petite gare de Pithiviers, à une centaine de kilomètres au sud de Paris, qui n’accueille plus de voyageurs depuis la fin des années 1960 et qui vient d’être transformée en musée par le Mémorial de la Shoah.
C’est par cette gare qu’ont transité une partie des 13000 Juifs – dont 4115 enfants – arrêtés à Paris et en banlieue le 16 juillet 1942 et les jours suivants par 9000 fonctionnaires français, à la demande des Allemands.
8160 d’entre eux, y compris les vieillards et les malades, ont été conduits au stade du Vélodrome d’Hiver, dans le XVe arrondissement de Paris. Avant d’être évacués vers les camps de Drancy (Seine-Saint-Denis), de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande (Loiret).
Depuis la seule gare de Pithiviers, huit convois sont ensuite partis vers les camps d’extermination, pour plus de 8000 déportés, ce qui en fait le deuxième site de déportation français après celui de Drancy. Quelques dizaines d’adultes seulement survivront.
« Cette gare, c’est le lieu où l’évènement français devient génocide européen. (…) C’est un lieu de mémoire unique en France », affirme Jacques Fredj, directeur du Mémorial de la Shoah.
« La France, ce jour-là, accomplissait l’irréparable »
Le site de 400 m2, qui appartient toujours à la SNCF, est en particulier destiné aux scolaires. « C’est une priorité face à la montée de l’antisémitisme, du racisme et des complotismes », explique M. Fredj.
Une salle de la gare est consacrée à un reportage photo poignant sur la rafle dite « du billet vert », première arrestation massive de 3.700 Juifs étrangers en France, le 14 mai 1941.
Une autre salle retrace « la litanie des huit convois » vers Auschwitz-Birkenau, projetant sur des écrans géants les photos de déportés assassinés.
Dans son discours, d’une vingtaine de minutes, Emmanuel Macron devrait affirmer que « le combat continue » contre l’antisémitisme, en suivant « le chemin que le président Chirac avait tracé ».
Après cinquante ans de silence des autorités françaises, Jacques Chirac avait reconnu en 1995 la responsabilité de la France dans la Rafle du Vel d’Hiv, dans un discours resté gravé dans les mémoires. « La France, ce jour-là, accomplissait l’irréparable », avait-il lancé.
En juillet 2012, François Hollande avait été plus loin en déclarant que « ce crime fut commis en France, par la France ».
Puis en 2017, Emmanuel Macron, nouvellement élu président, avait réaffirmé, pour le 75e anniversaire de la rafle, la responsabilité de la France et prononcé un plaidoyer contre l’antisémitisme en présence du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.
Mais aujourd’hui « la société française n’en a pas fini avec l’antisémitisme », souligne l’Elysée, en mettant aussi en avant la « banalisation de débats » autour du régime de Vichy.
Le candidat d’extrême droite à l’élection présidentielle Eric Zemmour (Reconquête!) a notamment soutenu que le maréchal Pétain avait « sauvé » des juifs français durant la Seconde Guerre mondiale.
« Il y a 80 ans, les collaborationnistes du régime de Vichy ont organisé la rafle du Vel d’Hiv. Ne pas oublier ces crimes, aujourd’hui plus que jamais, avec un président de la République qui rend honneur à Pétain et 89 députés RN », a tweeté samedi la cheffe de file des députés LFI Mathilde Panot, suscitant l’indignation dans la majorité.
En 2018, M. Macron avait qualifié Pétain de « grand soldat » durant la Première Guerre mondiale, même s’il a ensuite « conduit des choix funestes ».
Des élus du Rassemblement national ont aussi été invités, par tradition républicaine, a détaillé l’Elysée, sans préciser s’ils seraient présents.
Parallèlement, la traditionnelle cérémonie sur le site de l’ancien Vélodrome d’Hiver se déroulera dans la matinée en présence de la Première ministre Elisabeth Borne.
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