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Ukraine: les Russes avancent dans le Donbass, bombardement massif sur Sloviansk

Les forces russes ont continué mardi d’avancer dans le Donbass, bassin industriel de l’est de l’Ukraine qu’elles veulent finir de conquérir, avec dans le viseur la ville de Sloviansk, cible d’un violent bombardement qui a fait au moins deux morts.

Pavlo Kyrylenko, le gouverneur de la région de Donetsk où est située Sloviansk, a indiqué sur Telegram que deux personnes avaient été tuées et sept blessées par ces frappes, qui ont touché le marché central.

Des journalistes de l’AFP ont vu des roquettes frapper le marché, où elles ont provoqué un incendie, et les rues adjacentes.

Rouslan, un commerçant interrogé deux heures après le bombardement, peinait à retenir ses larmes alors qu’il regardait son magasin brûler. Il a dénoncé un « génocide » perpétré par les forces russes, assurant que de tels bombardements visaient à « faire peur aux gens, afin qu’ils fuient » la ville.

« Une fois encore, les Russes visent intentionnellement des endroits où se rassemblent les civils. C’est du terrorisme pur et simple », a dénoncé le gouverneur Kyrylenko, appelant à évacuer.

Après la chute dimanche de Lyssytchansk, ville stratégique pour la conquête du Donbass, les forces russes progressent vers l’ouest et Sloviansk, qui comptait 100.000 habitants avant la guerre.

« Bombardement massif de la ville. Le centre, le nord. Tout le monde reste à l’abri », a alerté sur Facebook Vadim Liakh, le maire de la ville.

Lundi, le président russe Vladimir Poutine avait ordonné à ses troupes de prendre le reste du Donbass, déjà en partie contrôlé par des séparatistes prorusses depuis 2014.

Lyssytchansk était le dernier bastion important tenu par Kiev dans la province de Lougansk, qui avec celle de Donetsk forme le Donbass.

Mardi, les troupes russes ont progressé vers l’ouest en direction de Sloviansk et Kramatorsk, les deux plus grandes villes de la province de Donetsk, encore sous contrôle ukrainien. En matinée, elles se trouvaient à une dizaine de kilomètres de Siversk, qu’elles pilonnent depuis plusieurs jours, et donc à une cinquantaine de kilomètres de Sloviansk.

L’armée russe a affirmé mardi avoir bombardé deux postes de commandement ukrainiens à Donetsk.

Dans le sud, Moscou a affirmé avoir abattu « un avion Su-25 et trois drones des forces ukrainiennes dans la région de Kherson », des affirmations impossibles à vérifier de source indépendante.

Un responsable russe issu des puissants services de sécurité (FSB) a pris la tête mardi du gouvernement de la zone occupée dans cette région par les forces russes, a annoncé l’administration locale.

La Russie a par ailleurs déclaré mardi enquêter sur des tortures qu’auraient subies, selon elle, des soldats russes capturés par les forces ukrainiennes et libérés lors d’un échange de prisonniers avec l’Ukraine.

L’Ukraine et la Russie, qui ont procédé à plusieurs échanges de prisonniers, s’accusent mutuellement de mauvais traitements et de tortures sur des prisonniers.

Le ministère russe de la Défense a aussi affirmé mardi soir que dans la région de Donetsk, des « nationalistes » ukrainiens préparaient « une provocation avec l’utilisation de substances toxiques » – de grandes quantités de chlore amenées dans une station de filtration minée, selon le ministère.

Il a ajouté que l’armée ukrainienne utilisait des infrastructures chimiques pour y baser ses hommes et ses armes, créant « les conditions préalables à des accidents pouvant entraîner la mort de milliers de civils ».

« Prêts à aller vite »

C’est dans ce contexte que s’achève mardi soir une conférence internationale de deux jours à Lugano (Suisse) organisée pour tenter de dessiner les contours de la reconstruction de l’Ukraine, dont Kiev évalue le coût à 750 milliards de dollars.

Des « fonds colossaux » nécessaires pour aider la population, reconstruire les villes et infrastructures détruites par la guerre, mais aussi « préparer les écoles et universités pour une nouvelle année scolaire » et « se préparer pour l’hiver », a souligné lundi soir le président ukrainien Volodymyr Zelensky.

La déclaration adoptée mardi à Lugano indique que les signataires « s’engagent pleinement à soutenir l’Ukraine tout au long de son parcours ».

« Le processus de rétablissement doit être transparent et responsable devant le peuple ukrainien », indique la déclaration, alors que la perspective de l’afflux de milliards de dollars d’aide inquiète, la corruption étant endémique dans le pays.

Dans son rapport 2021 sur la corruption, l’ONG Transparency International classait l’Ukraine 122e sur 180 pays, et la Russie 136e.

« Quand nous disons que nous sommes prêts à aller vite, nous voulons vraiment dire vite », a assuré le Premier ministre ukrainien, Denys Chmygal, venu à Lugano.

La conférence, qui a rassemblé des responsables des pays alliés de l’Ukraine, des institutions internationales et le secteur privé, avait été planifiée bien avant la guerre déclenchée le 24 février par l’invasion russe, et devait initialement porter sur les réformes en Ukraine – et notamment la lutte contre la corruption.

A Bruxelles, les 30 pays membres de l’Otan ont lancé mardi le processus de ratification pour les adhésions de la Suède et de la Finlande, qui permettra à l’Alliance d’organiser une ligne de défense unie de l’Arctique à la Méditerranée face aux menées russes, mais dépendra aussi du bon vouloir d’Ankara.

« A 32, nous serons encore plus forts (…) au moment où nous faisons face à la plus grave crise sécuritaire depuis des décennies », a souligné le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg. « Mais cela va prendre plusieurs mois ».

« Guerre absurde »

L’Ukraine appelle par ailleurs ses alliés à faire pression sur les compagnies maritimes pour qu’elles cessent de faire du transport de marchandises pour la Russie et de l’aider à écouler ses productions.

Le Zhibek Zholy, un cargo battant pavillon russe, est ainsi ancré depuis cinq jours au large de la Turquie, en mer Noire. L’Ukraine, qui accuse la Russie de voler ses récoltes de blé, affirme que le navire en transporte 7.000 tonnes obtenues illégalement. Une source diplomatique turque a affirmé mardi à l’AFP qu’une « inspection » était en cours à bord.

M. Zelensky a dénoncé mardi le rôle des entreprises grecques dans l’exportation du pétrole russe.

Il a également dit « croire » que le Bélarus, un allié de Moscou, ne se laisserait pas « entraîner » dans la guerre.

Une opinion partagée par Svetlana Tikhanovskaïa, cheffe de file de la dissidence bélarusse, qui « doute vraiment que les troupes bélarusses », qui sont « extrêmement démoralisées », « participent à l’invasion de l’Ukraine », une « nation amie ».

La guerre continue par ailleurs de peser sur l’économie européenne: l’euro a plongé mardi à son plus bas depuis fin 2002 face au dollar, s’approchant de la parité, emporté par les tensions sur l’énergie en Europe provoquées par le conflit.

La Haute-Commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU Michelle Bachelet a fustigé le bilan civil « intolérable » du conflit (près de 5.000 civils tués confirmés, dont 335 enfants – sans doute bien en-dessous du bilan réel) et les nombreuses violations des droits humains visant la population.

« Au nom de chaque victime de cette guerre absurde, les exécutions, la torture et les détentions arbitraires doivent cesser », a-t-elle lancé devant le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies à Genève.

Le conflit a causé l’un des plus importants déplacements de population en Europe – plus de huit millions d’Ukrainiens – depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

Sur le plan militaire, des sources de sécurité occidentales évoquent 15.000 à 20.000 soldats russes tués. Les forces ukrainiennes perdent chaque jour une centaine de soldats, selon Kiev.

Les autorités françaises ont confirmé mardi « la triste nouvelle » de la mort d’un second combattant français en Ukraine.

Source

Le Quotidien

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